mardi 13 avril 2010

Mon intervention du 12 avril 2010 sur les conséquences de la tempête Xynthia

Dans notre département  sinistré, le canton de Rochefort Nord a été particulièrement frappé par la tempête Xynthia.

La commune d’Yves, sur laquelle se trouve une partie du village des Boucholeurs, la commune de Fouras et la pointe de la fumée, l’Ile d’Aix, Rochefort et son quartier Libération, ont été gravement touchés, le marais de Saint Laurent de la Prée et la Réserve Naturelle d’Yves ont été dévastés…

Après un tel cataclysme, comment ne pas saluer une fois encore, l’action exemplaire des services publics sous l’autorité du préfet, celle des élus de terrain qui ont organisé les secours, participant aux opérations de sauvetage, et réconforté les victimes au centre d’un réseau de solidarité jamais atteint de mémoire de charentais.

Monsieur le président, vous nous avez très vite réunis et nous avons, décidé à l’unanimité, en session exceptionnelle, un train de mesures urgentes et nécessaires. La Région a répondu présente et a tout de suite pris, de son côté, des décisions concrètes applicables immédiatement.

Après le déferlement de la tempête, nous avons vu vos collègues du gouvernement, et par 2 fois le Président de la République qui nous a assuré du soutien sans faille de l'État.


A cette session, j’aurai aimé pouvoir me féliciter des dispositifs mis en œuvre, gage d’un redressement rapide par l’action conjuguée de tous les acteurs quelque soient leurs engagements politiques. Or je suis contraint d’exprimer mon profond désaccord de ce qui s’est passé ensuite.


Ce fut d’abord votre intention de proposer un « impôt tempête » pour les charentais maritimes. Cela montrait à quel point les engagements de l'État, devaient être une fois de plus assumés en fait par notre collectivité. Vous êtes un membre éminent du gouvernement, et on aurait pu penser que votre influence aurait pu permettre la mise en œuvre d’une vraie solidarité nationale. Une fois de plus, ce n’était qu’effets d’annonce! Vous avez sous la pression des élus de gauche et sans doute de vos propres troupes,  renoncé heureusement à ce projet et nous en prenons acte. Mais les économies que vous proposez sont toujours départementales, il n’y a à ce jour, semble-t-il, rien de plus à attendre de l'État…

Mais surtout dans ce canton de Rochefort Nord que je représente, viennent d’être crées plusieurs « zones noires » et des zones oranges. Pour les premières, il n’y aurait aucune autre solution que la « délocalisation » des habitants ! Hier nous avons même vu sur une pancarte un mot plus terrible tant ces habitants sont choqués…

Monsieur le Préfet, nous avons entendu vos paroles de compassion, mais aussi votre discours de fermeté qui contraste d’ailleurs avec les propos dubitatifs de notre Président Ministre. Vous êtes là pour appliquer le diktat, exécuter l’oukase de notre Président de la République quels qu’en soient les effets sur nos concitoyens en détresse…

Or, je vous le dis calmement, fermement : vous ne pourrez pas passer ! Ce qui a été décidé ne pourra s’appliquer, en tout cas dans ce canton !

La méthode employée est inacceptable ! Vous précisez que ces décisions ont été prises au vu de rapports de vos ingénieurs départementaux, renforcés par une brigade de 14 experts nationaux qui auraient effectué plusieurs visites, échangé avec les maires et évalué les risques sur des critères objectifs.

Or, les maires concernés ignorent qui est venu, la date de la ou des visites et n’ont eu aucune communication des rapports que ces experts sont censés avoir rédigé !

Comment expliquer dans ces conditions aux habitants concernés les mesures radicales qui leur sont réservées ?

A l’Ile d’Aix, il n’avait  nullement été question de zone noire au cours des nombreuses réunions tenues et ce n’est que Mardi 6 Avril au soir, que le maire a appris, alors que le Conseil des Ministres se tenait le lendemain, la destruction programmée de 12 maisons, dont 5 résidences principales abritant 8 personnes. Ces personnes, depuis 1 mois ½, avaient déclenché leurs assurances, travaillé jour et nuit à la remise en état,  payé des entreprises, de la main d’œuvre…Je ne parle pas de ceux qui perdent leur outil de travail juste avant la saison…
La commune de l’Ile d’Aix n’a aucun moyen de les reloger! De plus, la création de zones noires, ici, et pas dans certains secteurs inondés de l’Ile de Ré par exemple, est incompréhensible !

Vous agissez en vertu de la loi Barnier –article L 561-1 du Code de l’Environnement :
Ce texte est inapplicable ! Il prévoit que l'État peut déclarer d’utilité publique l’expropriation de biens exposés au risque prévisible de mouvements de terrain, d’affaissements de terrain dû à une cavité souterraine ou à une marnière, d’avalanches ou de crues torrentielles…mais pas le risque de submersion marine.

On a confondu vitesse et précipitation, avant d’agir, il fallait changer la loi !

Toute Déclaration d’Utilité Publique s’appuyant sur ce texte serait, en l’état, illégale.

            Mais supposons que la loi Barnier s’applique…Il faut encore que «  les moyens de sauvegarde et de protection des populations s’avèrent plus coûteux que les indemnités d’expropriation »

Je suis élu depuis 1998. Je n’ai cessé de voir les maires des communes du littoral du canton réclamer à corps et à cris les moyens d’entretenir les protections, de les consolider ou de les recréer lorsqu’elles avaient disparu.

L'État s’est désengagé depuis longtemps au motif que « c’est au propriétaire de se protéger ». Le résultat est que malgré l’aide du Département, nos digues qui ne protègent pas seulement les biens riverains de la mer, mais aussi dans notre plat pays toute une série d’équipements et de biens plus lointains … étaient souvent dans un piteux état, l’action menée « au fil de l’eau », s’apparentant à un travail de « Shadock »…

A l’Ile d’Aix, où le Génie d’Angers a mené le plus gros chantier jamais entrepris dans la commune, ce sont les protections qui n’avaient pas été touchées en 99 qui se sont effondrées faute d’entretien!
A Yves, c’est par la Réserve Naturelle que l’eau s’est engouffrée, en causant non seulement les dommages du village des Boucholeurs, mais la destruction du marais.

Or des solutions existent et aujourd’hui grâce au Conseil Général, elles peuvent être mises en œuvre, puisqu’ainsi que j’ai pu le constater lors d’une réunion le 30 Mars en mairie d’Yves, l’ensemble des acteurs concernés, mairie, Conseil Général, LPO, Conservatoire du Littoral, sont enfin d’accord sur le système défensif à mettre en œuvre.
A cet endroit, pourrait se créer une zone exemplaire de coexistence sereine et sécurisée entre les amoureux de la nature, la profession ostréicole, et les habitants. Certains d’entre eux sont ici depuis 5 générations. Il y a des actes du début XIXè qui portent sur les biens que l’on veut détruire… Or on ne parle pas de détruire ni le Vieux Port de La Rochelle, ni les Minimes…

Avec l’argent des expropriations envisagées, disait un habitant interviewé à la télé, on pourrait créer des digues en or !


Alors, certes, protégeons les populations, mais donnons-nous le temps d’une évaluation, d’une jauge des risques qui tiennent compte de l’histoire, de ce qui n’a pas été fait et aurait dû l’être, en concertation et avec l’expertise des acteurs de terrain, plutôt que ce découpage qualifié par le maire de Fouras de « découpage à la hache », moi je dirai plutôt de « massacre à la tronçonneuse ». Il génère un profond sentiment d’injustice s’ajoutant au désespoir des victimes…

Monsieur le Préfet, toute la population est « vent debout », qu’elle se trouve ou non  dans une zone concernée, les associations sont ensemble et déterminées ! Il faut faire renoncer l'État à cette mauvaise copie, qui mérite d’être totalement revue sur toutes les zones sinistrées de notre département.

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